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Dialogue existentiel 26: peut-il y avoir un consensus moral ?

Dialogue existentiel 26: peut-il y avoir un consensus moral ?

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Peut-il y avoir un consensus moral?

Peut-il y avoir un consensus moral?

Un dialogue entre Aurelius l’ange et Gottfried l’oiseau. Aurelius se veut le gardien de la pensée judéo-chrétienne classique tout en restant attentif et compatissant. Gottfried pense que chaque être est indépendant mais fait partie d’un ensemble logique et harmonieux que le chant fait deviner.

Gottfried: Aurelius, vous avez l’air tout désemparé, que se passe-t-il?

Aurelius: je viens d’apprendre des nouvelles qui me font douter de l’ordre du monde…

Gottfried: oh là, là, quoi donc?

Aurelius: Niccolò, les Daims, Luce, ils sont tous différents et ils se moquent de mes préceptes.

Gottfried: vous voulez  dire qu’ils ne partagent pas vos idées.

Aurelius: oui, c’est ça, j’ai l’impression que je vivais sur un nuage et que je viens de tomber brutalement sur terre. Et puis tout ce langage que les animaux utilisent maintenant, c’est comme s’il n’y avait plus de tabous!

Gottfried: Dieu ne vous avait pas prévenu de tous ces changements?

Aurelius: il a du le faire pendant les réunions où je ne suis pas allé.

Gottfried: Luce vous a fait une remarque à ce propos et elle a eu raison. Si vos principes ne sont pas mis à jour, comment voulez-vous comprendre le monde et nous aider?

Aurelius:  mais justement, c’est parce que les principes ne varient pas que le monde a des repères donc je ne pensais pas qu’ils devaient être changés! Il faut une morale universelle pour guider l’action, pas de la relativité.

Gottfried: oui et non, cher Aurélius. Principes et repères avancent en parallèle, si l’un change, l’autre aussi. L’impératif moral reste universel mais son contenu s’adapte.

Aurelius: il n’y a donc plus de vérité révélée?

Gottfried: il y a celle du consensus rationnel fondé sur des discussions éthiques.  Le principal, c’est que tous s’entendent sur des normes mais elles n’ont pas besoin d’être immuables. Au contraire, si elles s’adaptent aux évolutions, elles sont mieux comprises et mieux acceptées. Là aussi, c’est une évolution de la définition d ela morale et c’est pour cela que vous devez vous tenir au courant des choses.

Aurelius: donc la moitié des habitants du domaine a une sexualité hors-normes et c’est normal?

Gottfried: ils ont une sexualité comme tout le monde sauf vous. Quant aux normes à ce propos, elles ont changé donc ils ne sont pas hors-normes.

Aurelius: ça me semble une solution relativiste un peu facile et où cela va-t-il s’arrêter?

Gottfried: pourquoi cela devrait-il s’arrêter, Aurelius? Pour nous vivants, le changement est le signe que nous existons. Seule la mort fige les choses mais cela, vous ne le savez pas puisque vous êtes éternel.

Aurelius: je suis éternel, je n’ai pas de sexualité, comment puis-je alors vous comprendre et vous aider?

Gottfried: votre différence nous offre un point de vue qui nous permet de réfléchir mais ça ne veut pas dire que nous pouvons vous ressembler ou partager votre idéal. Vous nous poussez à aller un peu plus loin dans notre rectitude morale mais vous devez savoir que nous ne pouvons pas atteindre vos objectifs. Sur certains points ceci dit, vos attentes sont datées et elles ne correspondent plus à l’existence que nous avons. C’est pour cela que le consensus éthique est toujours à refaire mais il n’est pas relativiste puisqu’il s’adresse à tous.

Aurelius: donc si je vous comprends bien, je vous protège parce que je questionne vos actions et je vous oblige à plus en peser la valeur que vous ne le feriez autrement.

Gottfried: oui, c’est ça, vous nous évitez sans doute de faire trop d’erreurs quand nous prêtons attention à vos remarques mais le questionnement n’aura jamais de fin pour vous puisque le vivant ne vous ressemblera jamais. Par contre, si vos remarques sont désuètes, cela ne fonctionne plus.

Aurelius: vous ne voulez pas prendre ma place?  Je pense que je dois aller me remettre à jour et vous seriez sans doute de bon conseil en attendant mon retour ou la venue d’un ange plus moderne.

Gottfried:  vous m’honnorez mais je suis mortel, j’ai une famille, je n’ai pas le temps de faire ce que vous faites. Et j’espère bien que vous n’allez pas partir.

Aurelius: on verra, il se peut que ce soit nécessaire. Dans tous les cas, ça m’a fait du bien de vous parler.

Gottfried: vous savez Aurelius, quoique vous fassiez, n’oubliez pas de chanter,  c’est toujours un plaisir pour nos âmes, qui que nous soyons.

Aurelius: c’est vrai, au moins je peux faire ça…


Analyse

La morale peut-elle être relative?

Ce dialogue fait suite au dialogue 22 mais offre une réponse différente aux interrogations d’Aurélius.

Pour lui, la morale doit être universelle afin de donner à chacun des régles claires et précises. La relativiser, c’est accepter tout et son contraire selon les envies et les préférences.

Pour Gottfried,  une morale universelle et impérative ne sait pas s’adapter aux cas concrets de l’existence. Il faut donc la remplacer par une morale du consensus née non pas de la révélation d’un seul mais de discussions entre individus qui définissent ce qui est acceptable ou non pour tous à un moment donné. C’est un relativisme revisité pour conserver à la morale sa valeur de commandement.

Discussions possibles

Croire que ce que je fais est juste, est-ce suffisant?

Comment concilier la guerre et l’impératif de ne pas tuer?

Pour finir

Envie de réflexion un peu plus poussée? Voyez, par exemple, De l’éthique de la discussion où Habermas recherche à quelles conditions une norme morale peut être valide.

Envie de contribuer à ces dialogues? Ecrivez-vos commentaires et questions ci-dessous.

Envie d’en savoir plus sur les goûts de Gottfried et Aurelius? Leur livres préférés sont dans la bibliothèque du domaine.


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