Le déterminisme dans le monde / Le départ de Baruch, Socrates et Emilies
Un dialogue entre Socrates le bâton et Baruch le héron. Socrates sait qu’il ne sait rien et cela le conduit à poser de nombreuses questions. Il examine ensuite attentivement les réponses. Baruch passe beaucoup de temps immobile et cela lui permet de comprendre que chacun est unique et particulier mais pourtant en relation avec les autres et l’univers
Socrates: Baruch, Baruch, êtes-vous là?
Baruch: j’arrive, Socrates, j’arrive, je réfléchissais à un mot qu’Héronne m’a envoyé.
Socrates: tout va bien?
Baruch: non, elle ne peut pas venir car son père est malade. Elle veut rester dans le sud pour prendre soin de lui.
Socrates: alors qu’allez-vous faire?
Baruch: je vais aller la rejoindre mais ce n’est pas une très bonne époque pour faire le trajet dans ce sens.
Socrates: une histoire de vents, de nourriture en chemin, d’endroits où dormir?
Baruch: oui, c’est ça.
Socrates: mais Héronne avait décidé de venir alors c’est sans doute faisable.
Baruch: sans doute, c’est aussi que je pensais créer une héronniere ici avec elle et que je cherchais des endroits propices où nous installer mais tout à coup, je dois changer mes plans. Il me faut un temps d’adaptation.
Socrates: je comprends, la vie est souvent faite d’imprévus. Figurez-vous que mes plans ont changé eux aussi mais avant de vous en parler, j’espère que vous serez encore là quand Baguette et moi nous nous marions. Vous êtes invité et c’est pour cela que je vous appelais.
Baruch: vous avez prévu cela quand?
Socrates: à la prochaine pleine lune; si le ciel est dégagé, cela fera une belle lumière.
Baruch: alors je viendrai car je serai encore ici. Et votre deuxième nouvelle?
Socrates: après le mariage, nous irons nous établir dans l’ouest.
Baruch: vous aussi vous quittez le domaine! Les choses se précipitent et les changements se multiplient! Vous savez qu’Aurelius part aussi?
Socrates : oui, il va en stage.
Baruch: mais qui sait s’il reviendra. Comme nous d’ailleurs… J’en suis un peu peiné bien que je sache que c’est inévitable et certainement positif.
Socrates: l’esprit aimerait être libéré du changement pour moins souffrir mais le changement est une loi du monde.
Baruch: oui, c’est comme cela qu’il évolue et crée des ordres nouveaux mais nous ne sommes jamais que ses jouets et c’est sans doute cela qui nous fait parfois souffrir. A moins bien sûr que nous acceptions le changement avec ferveur car cela nous redonne notre liberté.
Socrates: celle de choisir plutôt que de souffrir, vous avez raison mais ce qui peut nous chagriner encore, c’est le refus que les autres opposent parfois à nos idées quand ils pensent qu’elles remettent les leurs en question.
Baruch: pourtant le statut quo n’est pas acceptable malgré ce qu’ils aimeraient.
Socrates: il se peut que sa possibilité n’existe que pour nous forcer à choisir ce que nous pensons être la voie juste,
Baruch: mais dites-moi, pourquoi partez-vous dans l’ouest?
Socrates: pour mettre en place un projet que les Emilies m’ont mis en tête. Il se trouve que Baguette y souscrit sans hésiter et qu’elle a de la famille dans l’Utah qui a déjà commencé la même entreprise. Ce sera donc plus facile de nous associer avec eux.
Baruch: donc les Emilies vont partir aussi. Quel vide cela fera autour des étangs mais c’est comme cela que les choses avancent: des faits isolés qui apparaissent au loin puis se rejoignent soudain et créent des opportunités. Un déterminisme implacable mais souvent invisible.
Socrates: les Emilies se reproduiront cependant ici, j’en ai planté quelques-unes sur vos conseils.
Baruch: alors elles doivent être heureuses et cela explique certainement qu’elles soient prêtes à se consacrer à d’autres projets. Qui consiste d’ailleurs en quoi exactement?
Socrates: à fabriquer et vendre des appeaux.
Baruch: pour les chasseurs?!
Socrates: non, pour les amateurs d’oiseaux. Nous nous spécialiserons dans les espèces rares et celles qui n’intéressent pas les chasseurs.
Baruch: et le chant du héron, vous le ferez?
Socrates: je ne sais pas encore mais si nous le faisons, nous irons vous voir pour vérifier que c’est réaliste!
Baruch: avec plaisir Socrates, avec plaisir. Même sans cela, vous savez que vous serez toujours bienvenu là où je serai, avec ou sans questions pour moi!
Socrates: oh, des questions pour vous, j’en aurai toujours alors vous me verrez sans doute régulièrement.
Analyse
Pourquoi les choses ne restent-elles pas comme elles sont?
Pour Baruch, cela est lié au déterminisme à l’oeuvre dans le monde. Un événement en apparence lointain provoque des changements qui finissent par nous affecter sans que nous l’ayons choisi, Notre liberté, c’est alors d’embrasser ce changement pour la nouveauté qu’il apporte.
Pour Socrates, le changement est une loi du monde qui lui permet d’évoluer. Notre esprit en est affecté mais il ne peut rien y changer. Ce changement nous met parfois en conflit avec ceux qui n’en voient pas la nécessité mais le statut quo n’est pas un choix tenable car il nous met en situation de porte-à-faux.
Questions possibles
Tout savoir et tout comprendre, est-ce souhaitable?
Le changement est-il synonyme de vie?
Pour finir
Envie de réflexion un peu plus poussée? Voyez, par exemple, La théorie du chaos (et la description de l’effet papillon) expliquée de manière simple par Gleick.
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